Bouillé-Courdault : à l’école au rythme de Tania, le cheval de trait breton

C’est une nouvelle rentrée qui s’annonce à Bouillé-Courdault, au sein de la petite Venise dans le marais poitevin en Vendée. Depuis 4 ans, une vingtaine d’élèves de cette petite commune se rend à l’école voisine en calèche, tractée par Tania, jument de trait breton de 16 ans sur un parcours de 3 kilomètres. Cette solution vertueuse hippomobile unique en Pays de La Loire crée une véritable synergie entre les habitants et contribue à fédérer du lien social autour du cheval. Reportage.

Pour cette 5ème rentrée, les sabots de Tania vont de nouveau résonner sur la départementale qui relie Bouillé-Courdault à Courdault. Sa mission ? Conduire les élèves jusqu’à leur école à un rythme slow. Un mode de transport scolaire qui ne passe pas inaperçu et ravit les habitants, réveillés par le martèlement des sabots de la jument.

Une fois garnie, Tania attelée à la voiture hippomobile attend sagement que Naomi lui donne l’ordre du départ. Crédit photo CC

Stéphane Guillon, maire de Bouillé-Courdault ne cache ni sa fierté ni son enthousiasme. « Au tout début, certains maires se sont moqués de nous, nous considérant un peu comme des passéistes, maintenant, ils nous appellent pour savoir comment nous avons mis en œuvre cette solution », s’en amuse ce dernier.

Les enfants se réapproprient le temps du voyage

Un projet, initié en janvier 2019, à la suite de la disparition du RPI (Regroupement pédagogique Intercommunal) avec la commune voisine de Courdault. En collaboration avec le centre équestre de la Colline des Frettis, l’idée d’un transport hippomobile pour la vingtaine d’enfants concernés émerge.  « Après l’accord des parents, nous avons établi un budget d’investissement pour l’achat d’un cheval, la construction d’une calèche homologuée et sécurisée fabriquée à Cognac en France ».

Un matériel moderne et de qualité

Une calèche moderne hors d’air et hors d’eau qui dispose d’un accès handicapés. Et en cas de grand froid, les enfants peuvent se couvrir de plaids bien douillets. Sur les 16000 euros prévus, il a fallu rajouter un harnais avec un collier américain sur mesure soit un total de 22000 euros. « Avec l’intention de ne pas faire payer le coût du transport plus cher aux parents qu’un bus normal, soit 11 euros par mois ».

Les Pays de la Loire, partenaires de l’opération se sont engagés à participer à la hauteur de 50 % pour les frais de fonctionnement, comme pour n’importe quel autre mode de transport scolaire.

Pendant que les écoliers travaillent, Tania s’adonne à son activité favorite : brouter. Crédit photo CC

Le départ s’effectue de Bouillé-Courdault vers 8h30 avec 2 arrêts. 16h30, c’est l’heure pour la jument de sortir de son pré à proximité de l’école, où elle broute la journée, n’effectuant qu’un seul aller et retour. Sur la départementale qui relie les deux communes, le panneau signalétique Transport hippomobile donne le ton aux automobilistes.

Un pilier éducatif

Pansage, garnissage du harnais, Naomi, meneuse professionnelle et monitrice d’équitation salariée de la Colline des Frettis, accompagnée d’un groom, guides en main, positionne Tania à l’arrêt pour faire monter les enfants, sourire aux lèvres, munis de leurs gilets jaunes et pressés de se raconter les anecdotes de la journée. Loin d’être novice, Tania achetée chez Cheval Diffusion à Nozay, en Loire-Atlantique effectuait du halage. Désormais, elle ne tracte plus les péniches mais les petits écoliers !

Naomi procède au garnissage de Tania. Crédit photo CC

« Au gré des saisons, ils partagent un temps de transport en commun, se réapproprient le temps du voyage et apprennent à observer la flore et la faune du marais. Un véritable pilier éducatif. D’ailleurs, lorsqu’ils arrivent à l’école, les enfants sont parfaitement réveillés et aptes à se concentrer plus facilement », insiste Antoine Auguin, propriétaire de la Colline des Frettis. « Tania redonne sens au transport scolaire », poursuit ce dernier.

C’est l’heure du retour en voiture hippomobile pour les écoliers. Crédit photo CC

En effet, répondant parfaitement aux ordres de Naomi, la jument alterne pas et trot, instaurant une ambiance où le temps s’écoule différemment, où la notion d’instant présent prend toute son intensité.

Une calèche qui s’anime autour de jeux à l’instar d’un Trivial poursuite sur l’attelage et se décore lors de Noël, d’Halloween ou autres manifestations festives où chacun participe dans un esprit convivial.

On travaille avec du vivant

Au-delà du transport, Tania fédère aussi bien les petits que les Anciens, recréant ainsi un esprit village. « Le matin, les habitants ouvrent leurs volets, attentifs aux pas rythmés de la jument. C’est un peu la star de la commune. »

Tania, ambassadrice de souvenirs

Une star particulièrement chouchoutée et respectée. « Le bien-être de l’animal demeure primordial. Lorsqu’elle a un souci, c’est une autre jument, Comtoise cette fois qui prend le relais. On travaille avec du vivant », souligne Antoine Auguin, propriétaire de la Colline des Frettis, qui a créé une école d’attelage pour valoriser ce type d’initiatives.

Chacun prend place dans le bus hippomobile et c’est parti pour 20 minutes de trajet. Crédit photo CC

Après un bonbon de récompense, quelques caresses et bisous sur son nez tout doux, Tania retrouve ses copains au centre équestre.

De retour au centre équestre, il faut dégarnir Tania et ranger le matériel. Crédit photo CC

« C’est certain, ils se souviendront toute leur vie de cette expérience », conclut Stéphane Guillon. Ambassadrice de souvenirs et créatrice d’émotions, Tania la jument n’a pas fini de susciter l’émerveillement auprès des enfants, voire des vocations de meneur…

Le petit plus ? La rédaction de Terre et Sabots a vécu l’expérience immersive du trajet avec Tania. Petit extrait du chant des sabots de Tania.